Scandale : un concours de recrutement à la la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) annulé pour népotisme

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En 2022, la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) lance un concours pour recruter de nouveaux cadres. L’enjeu est important : il s’agit de renforcer son personnel supérieur dans toute la zone CEMAC. Mais ce processus, qui aurait dû refléter la rigueur et la transparence attendues d’une institution monétaire régionale, va rapidement être rattrapé par des accusations de népotisme et d’irrégularités, jusqu’à une annulation officielle en juillet 2025. Retour sur trois années de turbulences.

Le concours : un enjeu régional majeur

À la fin de l’année 2022, la BEAC ouvre un concours pour le recrutement de 45 agents d’encadrement supérieur. Ces postes sont stratégiques : ils doivent pourvoir les différentes directions nationales et centrales de la banque, à travers les six pays membres de la CEMAC.

L’organisation du concours est confiée au cabinet AfricSearch, chargé d’assurer les épreuves dans plusieurs capitales africaines. Mais très vite, des voix s’élèvent pour dénoncer un processus peu clair. Certains candidats et observateurs s’interrogent sur le choix du cabinet, les critères de sélection, et l’absence de garanties réelles sur l’équité du concours.

Les premiers soupçons

Dès la fin des premières épreuves, des irrégularités sont signalées. Plusieurs candidats dénoncent des conditions d’examen inégales d’un centre à l’autre : retards, équipements insuffisants, consignes mal communiquées.

D’autres alertent sur la présence de candidats pourtant inéligibles, selon les critères de l’appel à candidature, parmi les personnes déclarées admissibles. S’ajoutent à cela des accusations plus graves encore : certains admis seraient des proches ou enfants de hauts responsables de la BEAC ou d’institutions partenaires.

Le climat se tend. Sur les réseaux sociaux, des listes circulent. Dans la presse régionale, les mots “népotisme” et “concours truqué” reviennent en boucle. Devant la gravité des soupçons, le Comité ministériel de l’UMAC, organe de tutelle de la BEAC, décide en octobre 2022 de suspendre le processus.

L’audit : des dysfonctionnements confirmés

Pour faire la lumière, l’UMAC confie un audit indépendant au cabinet RSM France, mandaté début 2023. Le rapport est remis en mars 2025. Il confirme l’ampleur des dysfonctionnements :

• Le choix du prestataire AfricSearch s’est fait sans transparence ni appel d’offres clair.

• Plusieurs membres du jury n’avaient pas l’indépendance ou les compétences requises.

• Des écarts notables dans les conditions d’épreuves ont été relevés selon les centres.

• Environ 13 % des candidats retenus n’auraient pas dû l’être, selon les critères officiels.

L’audit ne laisse guère de doute : le concours a été profondément vicié, de l’organisation à la proclamation des résultats.

Une décision forte : l’annulation du concours

Face à ces conclusions, le Comité ministériel de l’UMAC se réunit le 12 juillet 2025 à Malabo. Il prend une décision inédite mais attendue : l’annulation pure et simple du concours.

Il est décidé qu’un nouveau concours devra être organisé, cette fois selon des procédures rigoureuses, transparentes, et mieux encadrées. Cette décision est saluée dans plusieurs pays comme un acte de fermeté et de restauration de l’intégrité institutionnelle.

Mais elle n’est pas sans conséquence : 65 candidats initialement admis, qui avaient déjà engagé leur avenir professionnel, se retrouvent dans l’incertitude. Certains avaient quitté leur emploi ou déménagé, misant sur leur intégration à la BEAC.

Que retenir de cette affaire ?

Ce scandale met en lumière les fragilités internes d’une institution pourtant centrale pour la stabilité économique régionale. Il rappelle que même les concours dits “internationaux” doivent faire l’objet de vérifications strictes, et que la méritocratie ne doit jamais être sacrifiée sur l’autel des relations personnelles.

L’annulation du concours est un pas nécessaire. Mais pour être crédible, la BEAC devra aller plus loin : réformes de gouvernance, publication des critères de sélection, supervision par des organes indépendants, et mise en place de recours effectifs pour les candidats.

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